dimanche 15 octobre 2017

"Spoonbenders" (Daryl Gregory)


Autrefois, l'Extraordinaire Famille Telemachus a failli connaître la gloire. Mais c'était avant l'émission de télé au cours de laquelle les pouvoirs de ses membres ont été tournés en ridicule, avant qu'un cancer n'emporte Maureen, la mère, à l'âge de seulement 31 ans. Deux décennies plus tard, les Telemachus ont perdu toute leur superbe. Teddy, le père, continue à porter costume, Borsalino et montres de luxe, survit grâce à de mystérieux subsides et tombe amoureux chaque jour d'une femme différente. Irene, la fille aînée si brillante, sait quand les gens lui mentent et, pour cette raison, ne parvient pas à garder un boulot intéressant ni à entretenir une relation amoureuse. Frankie, le cadet, a planté l'entreprise de téléphonie qu'il avait lancée et emprunté de l'argent à la Mafia pour couvrir ses dettes; maintenant, il ne parvient plus à rembourser et un étau dangereux se referme sur lui. Buddy, le benjamin toujours silencieux qui n'a jamais quitté la maison familiale, s'affaire à de très étranges préparatifs. Il a de bonnes raisons pour ça: ses visions du futur s'arrêtent net au 4 septembre 1995, soit dans 3 mois... 

Si Daryl Gregory a remporté plusieurs prix littéraires - notamment le World Fantasy Award de la novella - avec "Nous allons tous très bien, merci", je n'avais jamais rien lu de lui avant "Spoonbenders" dont la jolie couverture rétro a attiré mon attention au W.H. Smith de l'aéroport de Dublin. Dès les premières pages, j'ai été happée par ce roman à l'histoire si originale, dont la mécanique de précision m'a entraînée d'un chapitre à l'autre sans que je parvienne à interrompre ma lecture avant une heure avancée de la nuit. Perdants attachants malgré la graine de grandeur qu'ils portent en eux, les Telemachus entretiennent les uns avec les autres des rapports dysfonctionnels criants de vérité. L'auteur se balade d'une plume très sûre sur le fil tendu entre chronique familiale et récit à suspense, entre drame et comédie, entre un quotidien terne, souvent pénible, et l'éclat subit mais incontrôlable de pouvoirs fantastiques, entre un passé marqué par l'empreinte de la Guerre Froide et un futur en forme de point d'interrogation. Et si je déplore que beaucoup d'histoires prometteuses se terminent de façon décevante, ici, les derniers chapitres sont une longue apothéose mouvementée et jubilatoire. Bref, "Spoonbenders" est une merveille.

"It was true that he was unusually nostalgic for a kid, though what he pined for was a time before he was born. He was haunted by the feeling that he'd missed the big show. The circus had packed up and left town, and he'd shown up to find nothing but a field of trampled grass. But other times, especially when Mom was feeling good, he'd be suddenly filled with confidence, like the prince of a deposed royal family certain of his claim to the throne. He'd think: Once, we were Amazing." 

"The problem with getting old was that each day had to compete with the thousands of others gone by. How wonderful would a day have to be to win such a beauty contest?To even make it into the finals?Never mind that memory rigged the game, airbrushed the flaws from its contestants, while the present had to shuffle in the spotlight unaided, all pockmarked with mundanities and baggy with annoyances, traffic fumes and blaring radios and fast-food containers tumbling along the sidewalk." 

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